Les Dinosaures

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Sauripelviens

Les Cœlurosauriens sont des coureurs bipèdes, carnivores, de petite à moyenne taille, à ilion allongé. La lignée est jalonnée par Coelophysis  (Trias supérieur américain). Compsognathus , le plus petit Dinosaure connu (60 cm) du Jurassique d’Europe, Elaphrosaurus  du Jurassique supérieur d’Afrique orientale, qui étaient tous des formes graciles, à petites dents pointues. Au Crétacé, outre la persistance de formes comparables, apparaissent des espèces plus grandes (4 m), soit prédatrices, soit dépourvues de dents comme Sthruthiomimus  et Ornithomimus . Le régime alimentaire de ces animaux, qui présentent une étonnante adaptation anatomique à la course, comparable (leur nom l’indique) à celle de l’autruche, demeure une énigme.

Les Carnosauriens constituent la lignée des grands Dinosaures carnivores, toujours bipèdes. Le type en est Allosaurus , du Jurassique supérieur américain. On peut le décrire comme un Cœlurosaurien agrandi, aux proportions plus lourdes, au cou relativement plus court, aux membres antérieurs réduits, à trois doigts griffus. La lignée se poursuit au Crétacé avec des formes comme Gorgosaurus  et elle culmine avec le célèbre Tyrannosaurus  (Crétacé supérieur), haut de cinq mètres, long de plus de dix. Le crâne, de 1,40 m de longueur, allégé par une fenestration remarquable, portait des dents longues de 15 à 20 centimètres. On a longtemps placé à l’origine des Carnosauriens un ensemble de grands carnivores bipèdes assez mal connus du Trias supérieur, tel Teratosaurus . Colbert a fait pourtant remarquer (1964) que les Carnosaures et les Cœlurosaures ont en commun un ilion très allongé; au contraire, Teratosaurus  et les formes voisines ont un bassin à ilion très court et ne pourraient être à l’origine des Carnosauriens. Ceux-ci et les Cœlurosauriens auraient au contraire d’étroits liens de parenté et ils constituent ensemble, parmi les Dinosaures Sauripelviens, le groupe des Théropodes.

Aux Théropodes s’opposent les Sauropodes, dont le type est le célèbre Diplodocus  du Jurassique supérieur américain. L’origine de ce groupe est mieux comprise depuis quelques années. On connaissait dans le Trias supérieur une série d’assez grands Dinosaures à ilion court, et plus ou moins bipèdes; certains, adaptés au régime carnivore, tel Teratosaurus , étaient, comme on l’a vu, les précurseurs écologiques mais non phylogéniques des Carnosauriens: on les appelle les Paléopodes. D’autres, comme Plateosaurus , du Trias supérieur européen, étaient végétariens: ce sont les Prosauropodes. On admettait qu’à partir de ceux-ci un retour complet à la quadrupédie s’était effectué pendant le Lias, aboutissant ainsi aux Sauropodes typiques du Jurassique supérieur. La découverte récente de Prosauropodes triasiques déjà parfaitement quadrupèdes (Melanorosaurus ) montre que ce type structural s’est, en fait, différencié bien plus tôt. Les Sauropodes «classiques» sont connus du Jurassique moyen au Crétacé supérieur. La plupart ont des membres antérieurs un peu plus courts que les postérieurs et un corps très élancé, c’est le type du Diplodocus  et du Brontosaure. Les Brachiosaures, au contraire, avaient un cou redressé, les membres antérieurs plus longs que les postérieurs. Outre ces caractères, on distingue les différents types d’après la disposition des narines et des dents. Il est classique de représenter les Sauropodes comme d’indolents amphibies envasés dans les marécages. Des considérations anatomiques, écologiques et physiologiques sérieuses remettent en cause cette interprétation (R. Bakker, 1971). Il paraît maintenant plus plausible, mutatis mutandis , de se représenter ces animaux dans le rôle écologique des Proboscidiens actuels, un peu «comme des éléphants ayant la tête au bout de la trompe».

Avipelviens

L’évolution des Ornithischiens (ou Avipelviens), restée longtemps obscure, est de mieux en mieux connue, grâce à des travaux récents. La découverte de représentants primitifs du groupe, dans le Trias supérieur d’Afrique du Sud (Fabrosaurus ), a été décisive à cet égard. Fabrosaurus  est un Hypsilophodonte, c’est-à-dire un représentant du «tronc» ornithischien conservateur à partir duquel se différencient, au Jurassique et surtout au Crétacé, des branches variées. Du Trias au Crétacé, les Hypsilophodontes conservent une taille médiocre, une posture bipède, une denture complète, un régime herbivore. La lignée est jalonnée par Geranosaurus  au Trias, Hypsilophodon  au Crétacé inférieur, Thescelosaurus  au Crétacé supérieur.

Au Crétacé inférieur apparaissent de grands bipèdes herbivores, les Iguanodontidés, aux dents nombreuses et crénelées. Les Hadrosaures (ou Trachodontes) du Crétacé supérieur peuvent être tenus pour l’aboutissement de formes comme Iguanodon . Les dents nombreuses forment une table abrasive [cf. DENTS], certains sont bipèdes mais la quadrupédie devait aussi être possible. On appelle souvent ce groupe «Dinosaures à bec de canard» à cause de la forme spatulée de la région maxillaire. On leur prêtait classiquement un mode de vie amphibie, mais, comme pour les Sauropodes, des analyses détaillées, d’ordre anatomique, écologique et paléobotanique (Ostrom, 1962), sont récemment venues tempérer ce point de vue. Tandis que certains Hadrosaures possédaient un crâne de morphologie «normale» (Hadrosaurus , Edmontosaurus ), d’autres se signalent par l’extraordinaire développement de crêtes osseuses céphaliques variées, liées aux voies respiratoires (Lambeosaurus , Parasaurolophus ). L’interprétation de ces structures (rôle olfactif, dimorphisme sexuel, «schnorchel», etc.) n’a pas permis, jusqu’à présent, de parvenir à des conclusions vraiment convaincantes.

Une autre lignée d’Ornithischiens bipèdes est représentée au Crétacé supérieur par les Pachycéphalosauridés. Comme leur nom l’indique, ils se signalent par un extraordinaire épaississement des os de la voûte crânienne. De récents travaux interprètent cette particularité comme une adaptation à des combats sexuels ou territoriaux, comparables à ceux de certains Ongulés actuels.

De nombreuses lignées indépendantes d’Ornithischiens se sont adaptées à la locomotion quadrupède, presque toujours associée à la possession d’épines ou de cuirasses osseuses. La lignée des Stégosaures s’épanouit dès le Jurassique. Stegosaurus  d’Amérique du Nord comme Kentrurosaurus  d’Afrique se caractérisent par la brièveté relative des membres antérieurs, par leur crâne petit et étroit. Le dos bombé portait deux rangées d’épines ou de plaques osseuses dressées qui se continuaient sur la queue. Au Crétacé s’épanouissent de nouvelles séries de quadrupèdes, les Ankylosaures. C’étaient des Reptiles très massifs, souvent enfermés dans une véritable carapace osseuse. La lignée serait représentée, au tout début de sa différenciation, par Scelidosaurus . Elle continue avec des formes d’aspect de plus en plus lourd, à la carapace compliquée de prolongements osseux. Le corps est large, les membres massifs. Toutes ces formes se rangent en cinq ou six familles principalement connues du Crétacé supérieur d’Amérique du Nord, de Mongolie et d’Europe. Citons les genres Ankylosaurus  et Nodosaurus  du Crétacé américain.

Les Cératopsiens constituent l’ultime rameau des Dinosaures avant leur extinction. L’apparition de ces quadrupèdes est en effet relativement tardive (Crétacé supérieur). Ils semblent clairement dériver de formes bipèdes proches des Hypsilophodontes, mais spécialisées par leur crâne court, à bec de perroquet, les Psittacosauridés. Les Cératopsiens proprement dits conservent cette particularité, mais sont tous quadrupèdes. C’étaient des herbivores comme tous les Ornithischiens: leur aspect devait être quelque peu comparable à celui des rhinocéros. Comme chez ces derniers, la tête, relativement énorme, portait des cornes. Celles-ci, de nature osseuse, étaient complétées par une collerette osseuse protégeant le cou. Le nombre de cornes, la disposition de la collerette, fenestrée ou non, sont de bons caractères systématiques. Le type de cet ensemble est Triceratops  du Crétacé supérieur nord-américain, à la tête énorme et massive. Les membres sont redressés et puissants, mais les antérieurs plutôt courts. Le groupe est bien connu par les squelettes complets de plusieurs genres. Il semble que la vitesse évolutive de cet ensemble ait été assez grande. Du petit Protoceratops  de Mongolie (dont on connaît les œufs) jusqu’aux formes terminales longues de sept mètres comme Torosaurus , on a pu proposer une filiation plausible entre la quinzaine de genres connus. Les Cératopsiens ne sont connus qu’en Mongolie et en Amérique du Nord, où ils s’éteignent au Crétacé terminal.

Il n’est pas douteux que la classe des Oiseaux trouve son origine parmi les Archosauriens, mais aucun document fossile antérieur au célèbre Archaeopteryx  (Jurassique supérieur d’Europe, connu maintenant par cinq exemplaires) ne vient éclairer le problème.

Oström a étayé l’argumentation faisant dériver Archaeopteryx  de Dinosaures Cœlurosauriens (donc Sauripelviens). Les relations phylétiques d’Archaeopteryx  (et par extension des Oiseaux) font à nouveau l’objet de multiples débats, étayés par l’argumentation cladistique. D’étroites relations phylétiques entre Oiseaux et Mammifères ont même été ainsi argumentées.

Ainsi Gardiner rassemble ces deux taxons (fig. 4) dans le groupe des Haemothermia  sur la base d’un métabolisme élevé permettant l’homéothermie, la différenciation de phanères tels que poils ou plumes, etc. Mais il est plus probable que les Oiseaux représentent le groupe frère d’un ensemble de petits Dinosaures Cœlurosauriens, les Deinonychosauria  dont le représentant type, Deinonychus , possédait sur un doigt une griffe en forme de lame de faucille dont il devait se servir comme arme offensive contre ses proies. En ce cas, les Oiseaux ne seraient, dans une conception cladistique de la systématique, qu’un rameau très dérivé des Dinosaures.

Ptérosaures

En ce qui concerne les Ptérosaures ou Reptiles volants, l’essentiel des connaissances n’a guère été renouvelé depuis le XIXe siècle. Les principales particularités structurales qui en font des machines volantes sont mentionnées dans l’article MEMBRES. Les premiers Ptérosaures apparaissent au Trias supérieur. Leur différenciation de la souche thécodonte est inconnue. Ils conservent au début un crâne volumineux, allégé par de grandes fenêtres antéorbitaires, une denture puissante, une queue allongée. Citons Dimorphodon  du Lias inférieur anglais, très primitif, Ramphorhynchus  du Jurassique supérieur, à la longue queue terminée en «gouvernail de direction» aplati.

Les Ptérodactyles, plus évolués, ont une queue fort réduite et diverses simplifications de l’architecture crânienne. Ils débutent au Jurassique supérieur par de petites formes (Pterodactylus ). Certains, tel Chtenochasma , possédaient une multitude de dents très allongées et fines comme des soies. Au Crétacé apparaissent les Pteranodon , gigantesques planeurs de sept mètres d’envergure. Les dents ont disparu, remplacées par un bec corné. Ils menaient sans doute une vie comparable à celle des grands Oiseaux marins actuels (frégates), avec un régime ichthyophage. Diverses caractéristiques (présence d’empreintes de poils notamment) rendent probable l’existence de l’homéothermie chez les Ptérosaures.

Au Crétacé terminal, les Dinosaures et, avec eux, les Ptérosaures dans les airs, les Mosasaures, Plésiosaures et Ichthyosaures, les Ammonites dans les mers s’éteignent à jamais. C’est vraiment la fin d’un monde, d’un complexe bio-écologique tout entier. Des modifications concomitantes de la flore, du climat, de la répartition des continents, de la taille des terres émergées au Crétacé terminal (voir Ginsburg, Axelrod et Bailey) nous paraissent liées à ces grands changements faunistiques plus qu’une quelconque «dégénérescence» de lignées ayant trop vécu! Plus qu’une explication unitaire simple, et sans doute simpliste, il paraît donc raisonnable d’envisager que la convergence, peut-être fortuite, de causes variées, externes et internes, réagissant les unes sur les autres selon une sorte de «réaction en chaîne», a provoqué cette révolution dans l’histoire de la vie que fut l’effacement des grands Reptiles, effacement qui, dès le Paléocène, va redonner sa chance à la lignée mammalienne, éclipsée par eux depuis le Trias.

 

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© 1997 Encyclopædia Universalis 

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